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Mise à jour 1:21 PM UTC, Apr 8, 2024
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A'Salfo : « Le Femua est devenu la CAN de la musique » Côte d’Ivoire – Yodé et Siro : « Nous sommes les porte-voix de notre pays »

Spécial A'Salfo : « Le Femua est devenu la CAN de la musique » Côte d’Ivoire – Yodé et Siro : « Nous sommes les porte-voix de notre pays »

Booba, Ferre Gola et Baaba Maal figurent parmi les invités phares de l’édition 2023 du Festival des musiques urbaines d’Anoumabo, lancé en Côte d’Ivoire par le leader du groupe Magic System en 2008.

La 15e édition du Femua se déroulera du 25 au 30 avril prochain. Devenu en Côte d’Ivoire un rendez-vous incontournable de la musique, il entend se positionner chaque année davantage sur les enjeux de développement économique et social. Entretien avec Salif Traoré, alias A’Salfo, son commissaire général.

Jeune Afrique : Comment avez-vous construit votre programmation ?

 A’Salfo : Le Femua se veut une plateforme de rencontres musicales. Nous invitons les leaders de différents styles musicaux. Booba, dans le rap, est adulé par une partie de la population, comme son poulain Didi B. Avec Ferre Gola, nous convions la rumba, avec Baaba Maal, le mbalax. Nous voulions une édition 2023 encore plus diversifiée.

Comment définiriez-vous les musiques urbaines aujourd’hui ?

La musique urbaine, c’est la musique qui touche tout le monde. Aujourd’hui, même les musiques dites traditionnelles se sont popularisées et modernisées. Le gospel, qui était typiquement religieux, est écouté bien au-delà de ce prisme. Toutes les musiques ont leur place au Femua : le rap, le zouglou, le coupé-décalé, la rumba, le reggae, etc.

 Quelles sont les nouveautés de cette édition ?

Nous allons installer, avec nos partenaires, MTN, un village technologique avec un espace de formation aux outils du numérique. Il y aura aussi le lancement d’un pass touristique avec le ministère du Tourisme. Ce pass offrira des réductions pendant plus d’un an dans plusieurs hôtels, restaurants et maquis.

Côté scène ivoirienne, place à Didi B, Roseline Layo, Safarel Obiang…

Ce sont des artistes qui ont tous déjà joué sur scène en live dans une grande salle. Ils ont été sélectionnés pour leur actualité, leur constance et leur professionnalisme. Didi B, un représentant du rap ivoire, a déjà participé au Femua avec son groupe Kiff No Beat. Aujourd’hui, il mène une carrière solo remarquée. Safarel Obiang est l’un des ténors du coupé-décalé. Son dernier spectacle, l’année dernière au Palais de la culture, en a surpris plus d’un.

J’avais découvert Roseline Layo avec son groupe Bella Mondo. C’est quelqu’un qui a su persévérer dans son domaine et qui, aujourd’hui, est l’étoile montante de la jeune génération de chanteuses en Côte d’Ivoire. Samy Success était sur la petite scène du Femua l’année dernière et le public l’avait plébiscité. Aujourd’hui, c’est l’un des dignes ambassadeurs du zouglou. KS Bloom, c’est le gospel qui rejoint la musique urbaine. Il a fait une tournée africaine et un grand concert au Casino de Paris, qui sont venus confirmer tout son talent.

 Booba est actuellement la cible de contestations au Maroc, avant un concert prévu en juin. Comment réagissez-vous par rapport à cela ?

 La programmation du Femua a été arrêtée depuis longtemps et l’histoire entre Booba et Magic System ne date pas d’aujourd’hui. Quand nous sommes arrivés en France à nos débuts, il était l’un des rares artistes à accepter de tourner un clip avec nous et à partager un peu de sa notoriété. Ce n’est pas un retour à l’envoyeur, mais depuis ce temps, Booba a su construire son chemin. Il est adulé en Côte d’Ivoire et en Afrique. C’est un honneur d’avoir un artiste de cette trempe sur le plateau de notre festival et qu’il partage la scène avec d’autres artistes qui viennent de débuter. Le Femua, c’est aussi une rencontre intergénérationnelle.

 Après la RDC en 2022, le Togo est l’invité d’honneur de cette édition.

 Le Togo et la Côte d’Ivoire entretiennent des liens d’amitié et de fraternité qui se sont consolidés avec les derniers événements politiques. Le Togo a été un médiateur dans la libération de nos 49 soldats au Mali. En l’invitant, nous voulons renforcer les liens culturels entre nos pays et le remercier.

Actualité politique et actualité musicale se rencontrent-elles au Femua ?

Le Femua est un festival d’intégration panafricaine. Quand on sort d’une telle crise politique grâce à la médiation et la sagesse des différents chefs d’État, c’est louable. C’est une action de paix et de cohésion sociale que nous voulons encourager. Féliciter le Togo s’inscrit dans les objectifs de promotion de la cohésion sociale que nous défendons depuis le début du festival.

 Être un festival d’intégration panafricaine, qu’est-ce que cela implique ?

Le Femua est devenu une Coupe d’Afrique des nations de musique. La Côte d’Ivoire est le pays en Afrique qui accueille le plus de communautés et le festival parvient à fédérer cette diversité autour de lui. Au Femua, vous verrez des Togolais, des Camerounais, des Congolais, des Burkinabè, des Maliens, des Guinéens, des Ghanéens…. C’est d’ailleurs pour renforcer cette cohésion que nous mettons chaque année un pays à l’honneur.

 La thématique de cette 15e édition est la sécurité alimentaire. Comment les artistes peuvent-ils agir sur ces enjeux ?

 Ce sont des porte-voix. Ils peuvent interpeller et sensibiliser. La crise sanitaire du Covid-19 et celle en Ukraine nous ont montré que nous étions encore dépendants des pays de l’Occident en matière d’alimentation. Nous avions l’impression que toutes les denrées de première nécessité en Afrique venaient d’ailleurs, avec une inflation incroyable. Or notre force, en Afrique, c’est une population composée à 70 % de jeunes.

C’est eux qu’il faut interpeller et informer sur l’entrepreneuriat agricole. L’Afrique doit investir davantage ces enjeux pour éviter une crise alimentaire. Au Femua, nous créons des espaces de rencontre autour de l’évolution de notre secteur agricole en impliquant fortement la jeunesse, en leur offrant des opportunités d’investissement et d’entrepreneuriat.

Comment sensibilise-t-on à ces enjeux depuis une métropole comme Abidjan ?

Nous avons la chance d’accueillir 30 000 jeunes par jour sur le site. Abidjan est un centre de rencontre où les populations rurales et citadines peuvent se croiser pour parler agriculture. Et le festival est retransmis en direct à la télévision. C’est aussi une occasion de passer des messages qui vont toucher non pas seulement la Côte d’Ivoire, mais toute l’Afrique. Et le Femua ne se déroule pas seulement à Abidjan.

L’Afrique doit investir davantage les enjeux agricoles pour éviter une crise alimentaire

Nous serons aussi à Bouaké, la deuxième ville de Côte d’Ivoire, une ville qui renait de ses cendres, avec une dynamique de développement que nous voulons accompagner. Elle a été une ville martyre, qui a traversé des moments difficiles pendant la crise de 2002. Nous aurons des débats avec les jeunes à l’université, dans les écoles…

Alors que les premières éditions étaient financées par les droits d’auteur de Magic System, le Femua est aujourd’hui soutenu par des dizaines de partenaires publics et privés.

Aujourd’hui, les gens ont compris que c’est un festival fédérateur. S’il y a un tel engouement pour l’accompagner, c’est parce que les partenaires ont compris que la culture peut répondre à des besoins sociaux. Toutes les actions du Femua sont basées sur le social. Cette année nous allons poser les premières pierres de deux écoles primaires, l’une proche de Bouaké, à Borobo, l’autre à Badikaha au centre-nord du pays. Ce sont les neuvième et dixième écoles que nous ouvrons.

Vous avez repris des études à HEC pour vous formez sur les enjeux des industries culturelles et créatives. Comment cela entre-t-il en écho avec le Femua ?

: À la fin de ce mois d’avril, je soutiens ma thèse qui porte sur la récupération automatisée des programmes de diffusion. Nous avons un vrai problème, ici, pour les auteurs-compositeurs, de recouvrement des droits d’auteur. Souvent, on est dans des partitions sociales où la somme est divisée en fonction du nombre d’artistes. Je travaille donc sur comment trouver une solution technologique qui permettent de récupérer les programmes automatisés afin de distribuer équitablement les droits. Ce sont des questions que nous aborderons aussi au Femua avec la présence de la Sacem et du Bureau ivoirien du droit d’auteur (Burida).

 Par Jeune Afrique Côte d’Ivoire – Yodé et Siro : « Nous sommes les porte-voix de notre pays »

Anne Bocandé23 avril 2023 à 10:34

: A’Salfo et Tino de Magic System sur scène au Femua à Abidjan, le 14 mai 2022.

© Sia Kambou/AFP A’Salfo et Tino de Magic System sur scène au Femua à Abidjan, le 14 mai 2022. © Sia Kambou/AFP

Dernière modification lelundi, 24 avril 2023 10:35